top of page
couv-scan1.jpg
couv-scan2.jpg

MON AUTRE

 

J’étais là, assis, et je ne savais plus si je pensais ou si je rêvais.

Non, je ne rêvais plus, la réalité était la plus forte, cette réalité si dure, si présente, si difficile à accepter, à supporter : perdre « Mon Autre », jour après jour, pas après pas, « Mon Autre » à moi que je ne savais plus nommer autrement.

J’avais longtemps cherché comment nommer cette si belle et grande personne avec qui j’avais partagé tant de moments. Je n’avais trouvé que « Mon Autre ». Je la sentais s’éloigner, je la voyais partir, cette personne aimée, vers une autre planète que je ne connaissais pas.

Toi « Mon Autre » !                          

Quelle était donc cette planète vers laquelle tu avais entrepris ce voyage ?

Cette question me taraudait l’esprit, le jour, la nuit, et puis encore le jour, et puis la nuit, cette question qui partait et revenait sans crier gare.

Je me sentais entraîné vers l’inconnu. Je ne savais rien de cette planète, tout juste aurais-je pu la nommer « la planète de la mémoire perdue ».

Je vivais par ce départ progressif un deuil à la forme inconnue, un deuil qui disait bien départ mais qui savait garder vie, un deuil qui était voyage vers un inconnu mais qui faisait persister ne serait-ce qu’un regard.

Car « Mon Autre » n’avait pas disparu de mon regard mais vivait encore. Son corps avait vieilli, comme tout corps que la nature fait, façonne, défait au fil du temps. Son cœur battait. Ses gestes étaient bien à elle. Elle était « Elle » mais devenait « Mon Autre ».

Il m’arrivait de laisser « Mon Autre » pour quelques heures, quelques jours, loin d’ici... mais si proche de moi.

« Mon Autre », tu étais là-bas, au milieu de tous tes semblables, tous ces « Autres » que l’on ne pouvait plus atteindre tant leurs planètes respectives étaient opaques, mystérieuses, chacune et chacun sur sa propre planète, toutes ces planètes singulières et inaccessibles.

Que restait-t-il dans la mémoire de chacune et chacun de toutes leurs pages de vie ?

Et que voulait dire ce mot « Vie » pour ces Autres, elles et eux qui, comme « Mon Autre », avaient construit, déconstruit, avaient avancé, puis reculé parfois dans l’écriture ininterrompue d’un livre propre à chacune et chacun ?

Comment savoir ?

Pourquoi savoir ?

Il m’avait fallu me faire violence pour accepter en mon for intérieur de partir ces quelques jours vers un lieu qui avait été « Nous » et ne le vivre pendant un moment que par « Moi ».

« Mon Autre » était là.

Tu étais là. Ta présence m’habitait mais que de questions, que d’énigmes, que de peurs !

Les chemins que je voyais là, devant moi, de l’autre côté d’un lac à l’eau si bleue, au milieu d’une forêt, ou encore le long d’un torrent, combien de fois les avions-nous empruntés ? Demain, plus tard peut-être, j’irais cheminer, seul, seul mais ... avec.

Où pouvaient désormais me conduire ces chemins ? Vers quel horizon ?

Ne pas m’y rendre, pas à pas, c’était t’abandonner, te perdre. Y repénétrer après tant d’années, c’était plonger ma main dans la boîte aux souvenirs, ouvrir mon cœur à tous les pétales de l’Amour.

Une force que je ne savais définir me disait « Avance ! ». Mais vers quel horizon voulait m’entrainer cette voix que j’entendais comme douce, sincère ?

Oui, quel horizon ?

« Mon Autre » et moi avions notre passé. Quel était aujourd’hui son avenir à « Mon Autre » ?

Vers où te dirigeais-tu ?

Comment lire ou écrire le mot « Avenir » ?

Et moi alors dans tout ça ?

Me voilà égoïste, ou simplement à chercher ma place sur une planète où pourtant je ne pouvais aller ?

Oui ... et moi ?

Cette question aussi me faisait mal et elle ne me quittait pas !

« Mon Autre » et moi avions su ce que « Nous » voulait dire, ce qu’il portait comme sens, comme force, comme Amour.

Mais maintenant ...

M’entendais-tu ? Me comprenais-tu ?

bottom of page